Si ces lettres doivent être vues elles seront vues, si tu me lis tu les liras, ou peut-être les ignoreras-tu si tu dois les ignorer. J'espère qu'elles auront une valeur, puisque d'avance je sais que leur beauté atteint des sommets - mais leur taille ?
Il s'agit plus encore que jamais d'étalage de chair, je m'éventre sans pudeur - j'en tremble d'avance - je pourrais aller en vomir.
(D'avance, je te décerne une lettre choisie par mes soins, par pudeur tout de même)
***
F,
Le jour où j'aurais su te parler aurait tout libéré. J'aurais été le naturel à l'état de nature, l'être que je suis, seulement tu le sais mieux que personne - ici personne n'a le droit de faire sortir son monstre.
Désormais il s'agit de cela. Je t'avais interdit de le différencier de toi de cette façon, m'obstinant - bancale ! à te le faire l'accepter. Pour cela il eut fallut que je prenne moi aussi soin du mien, plutôt que de le laisser grandir dans tous les sens.
Je me figure un monstre (qui n'est en fait que ma réalité) qui s'étire dans tous les sens, ma folie, ma grande folie ! elle éclate désormais, non pas toute entière mais plus encore qu'avant.
Elle appuie parfois si fort sur mes poumons que j'en suis incapable de respirer tout à fait, elle devient physique ! Le crois-tu. Cette force m'émerveille et m'émerveillera toujours, malgré le dégoût que j'éprouve pour elle (mon amour!) et qui grandit.
En effet, comme dit, j'ai oublié d'en faire quelque chose (peut-être s'agit-il de quelques minutes, jours, semaines... mois ?), et donc elle m'est assez étrangère. Je la vois déborder de chaque côté, non pas virulente mais effrayante.
Quelque chose est mort, ou est né, en moi, le soir, la nuit passés. Ce matin j'ai marché, sanglante, et ai croisé une personne de notre connaissance qui s'est affreusement effrayée.
Je suis persuadée qu'il s'agit d'une sorte d'aura, ce fameux shining que je n'arrive pas à contenir. Cette exacerbation est peut-être due aux substances que je n'ai de cesse d'ingérer depuis une très courte durée, j'y crois peut-être si je prends en compte les quelques valeurs décrites par des Hommes que nous connaissons bien.
Il ne s'agit pas tout à fait de cela que je souhaite t'écrire en réalité, mais nous avons tout les deux tendance à nous emporter n'est-ce pas ? Quoique paradoxalement tu en aies moins honte que moi.
La raison de cet actuel mélodrame est dû dans l'immédiat à quelques-unes de tes phrases qui encore une fois m'achèvent. Elles me font réaliser que j'ai oublié de t'aimer assez fort -
Ce que tu as fait, plutôt vous, ça a marqué la fin de quelque chose. De quelque chose qui me touchait moi, et qui me permettait de m'évader. De cette putain d'ambiance morose et malsaine d'en ce moment. De toute cette merde qui régit mon état actuel.
Je ne le supporte absolument pas, étant donné que je m'en sens coupable - tu m'interdis d'y mettre les sentiments, n'est-ce pas ? Mais tu ne me feras pas démentir le fait qu'ils te plaisent tout à fait, qu'ils t'enchantent, et que tu te plais à passer les nuits endormi sur moi plutôt que sur n'importe qui d'autre. J'y mettrais parfois l'idée que tu voudrais bien y passer chaque nuit. Hier encore je m'étonnais, comme je n'aurai de cesse de m'étonner, à ce que tu ne t'éloignas pas de moi : mais tu te rapprochais au contraire, et c'était si indiscret pour une fois que j'y ai vu ton envie de poser ta tête pour t'y reposer. Je suppose que je dois capter quelques énergies, bien que les mots soient faux. Tu y dors mieux que nulle part - tu n'y reviendrais pas avec la douceur d'un enfant si cela n'était pas le cas.
Et quand tu te réveilles en sursaut, tu tournes ta tête vers moi, tes yeux se défroissent et se déplient, ta mine est brouillonne et tendue - mais je suis là. Chaque fois que tu m'as vue sous toi tu t'es rendormis. Tu as cherché ma main sans la trouver tout à fait, et tu savais sans vouloir le savoir, le croire ? qu'ainsi tu m'explosais doucement le cœur.
Il m'est certain que tu y mettrais volontiers plus encore d'interdit, et de violence, mais par peur d'y laisser mon ventre, tu n'en fais rien avant d'être sûr.
Et quand je me décide à t'abandonner tu reviens, ta petite tête chaude et pleine d'amour. Tu es mon enfant aussi sûrement que je suis la tienne, et l'idée de laisser partir mon amant d'une foi révolue me donne la nausée, et l'envie d'y mourir d'avoir trop paniqué.
Tu m'as prise toute entière sans précaution, et en faisant l'erreur de ne pas m'accepter. Quand le poids a pesé sur ta tête une fois qu'elle n'était plus de ton son poids sur mon corps protecteur, tu as réalisé qu'elle était mauvaise... Dieux ! Qu'allons-nous faire ?
J'avais fait mon maximum et les cartes étaient entre tes mains, mon seul choix possible étant la destruction.
Je choisis de t'oublier - mais quoi qu'il en soit, la folie a échappé et plus jamais je ne serais le stéréotype.
Profite au moins que l'on puisse t'aimer tellement.
Je déteste Sarah.